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UNE B.O. INTEMPORELLE QUI NAVIGUE ENTRE NEO-CLASSIQUE ET CONTEMPORAIN, PASSANT PAR LA POP GROOVY ET LE SLOW
LA BANDE ORIGINALE DU FILM CULTE DE PHILIPPE LABRO DE 74
Le Hasard et la Violence est un film franco-italien étrange, réalisé par Philippe Labro en 1974 en collaboration avec Jacques Lanzmann au scénario. L’époque est aux films à thèse sur l’ultra-violence tels que Les Chiens de Paille de Sam Peckinpah (1971), Orange Mécanique de Stanley Kubrick (1971) et Délivrance de John Boorman (1972). Le long métrage de Labro se distingue de ceux de ses homologues américains par un partipris quasi onirique et une forme de psychédélisme soft. Une sorte d’ambiance lysergique qui a plus à voir avec l’idée que l’on peut se faire du trip LSD chez Castel que de la contre-culture californienne. Il y a de la crise du milieu de vie dans cette histoire du criminologue Laurent Berman (Yves Montand), en villégiature sur la côte d’azur afin d’écrire un essai sur la violence. Il est à la fois victime d’une agression et de l’amour qu’il porte à Constance Weber (Katherine Ross), une jeune doctoresse qui réveille en lui le démon de midi. Au sein de ce paradigme cinématographique, Labro a été traversé par une idée de génie en
demandant à Michel Colombier de composer la musique de son film. Michel Colombier, rappelons-le, est un musicien de formation classique, passé par le conservatoire supérieur de musique de Paris. On doit à Michel Magne de l’avoir repéré et on comprend pourquoi, connaissant l’esprit fantaisiste et en même temps sérieux du père de la B.O. des Tontons Flingueurs. Les musiques de Michel Colombier pour Le Hasard et la Violence sont à l’image de sa carrière : de Gainsbourg aux Beach Boys, en passant par Paul Williams (alias Swan dans Phantom of the Paradise de Brian de Palma). Une B.O. qui passe du néoclassique au contemporain, via la pop groovy et le slow. Sans oublier le thème du film, une ballade qui tue avec les paroles immortelles. Il y a dans la chanson interprétée par Drupi (connu en France pour son lacrymal "Vado Via"), une sorte de romantisme propre à Colombier. Oublions notre ironie postpost moderne qui ne remplace pas l’intelligence et laissons-nous happer par la puissance émotionnelle de cette B.O.
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LA BANDE-SON DU FILM CULTE DE 1962 D'HENRI VERNEUIL. Au début des années soixante, Michel Magne est déjà un nom reconnu mais il porte encore une étiquette rive gauche, certainement à cause de ses musiques d'avant-gardes (Musiques Tachistes), ses collaborations avec Françoise Sagan, ainsi que sa mise en musique de textes de Jacques Prévert, Charles Péguy et Bernard Dimey pour le magnifiquement christique, 'La Mort d'un Homme' (Chemin de Croix) (sur Barclay en 1961). La donne change soudain avec ses compositions pour le film Gigot, réalisé par Gene Kelly avec Jackie Gleason, le roi de la mood music, redécouvert aujourd'hui grâce à des personnalités telles que Joseph Lanza et Boyd Rice. À la nomination des Oscars, le nom de Michel Magne est cité ; ce qui lui ouvre les portes d'Hollywood, mais peu enthousiaste à l'idée de devenir un californien, il préfère rester à Paris. C'est ainsi qu'auréolé de sa nouvelle gloire, un cinéma plus grand public lui fait les yeux doux. À commencer par Henri Verneuil pour 'Un Singe en Hiver' avec en vedette rien de moins que le plus grand nom de l'époque, Jean Gabin et un jeune qui monte, Jean-Paul Belmondo. Quel cinéma populaire n'avons-nous pas là ! avec des dialogues d'Audiard d'après un roman d'Antoine Blondin. Une qualité française que n'appréciaient pas les tenants de la nouvelle vague sous emprise idéologique. Alors que ce cinéma de papa n'est rien de moins que le reflet d'un certain esprit de fronde gauloise, à la fois farouchement individualiste et qui, revenu de toutes les idéologies, n'a pas envie à l'instar de la chanson de Brassens de " mourir pour des idées ". La musique de Magne reflète les dérives nostalgiques d'Albert Quentin (Jean Gabin) qui après une jeunesse aventureuse passée sur le Yang-Tse-Kiang, vit " rangé des voitures " avec sa femme Suzanne (Suzanne Flon) rencontrée à la Bourboule et qui s'occupe de la destinée de l'hôtel Stella à Tigreville (en réalité Villerville dans le Calvados normand), et de Gabriel Fouquet (Jean-Paul Belmondo) jeune publicitaire qui a brisé son coeur à Madrid. Tout le génie de Magne se situe dans l'évocation de l'Espagne ou de la Chine, non pas telles qu'elles l'étaient à l'époque, mais telles que se les représentent ces deux protagonistes qui n'ont pas " le petit vin, ni la cuite mesquine ". Deux rêveurs qui s'offrent une parenthèse enchantée qui, " o tempora, o mores " n'ont pas à se soucier des antispécistes (apologie de la tauromachie), des concepts de réappropriation culturelle (Chine et Espagne de carte postale) et de loi Évin (saoulographie élevée au rang des beaux-arts). Voilà un bien bel album que vous pourrez vous repasser chaque fois que des bien-pensants s'en prendront à vos libertés fondamentales.