L'histoire du XXe siècle s'est accompagnée d'une production d'images sans précédent. Ce livre propose une réflexion sur le rôle de l'image dans la médiatisation de l'histoire contemporaine à partir de l'oeuvre de Chris Marker. Tout au long de sa vie, Chris Marker n'a cessé de réfléchir sur les soubresauts de l'histoire contemporaine.
L'histoire du XXe siècle s'est accompagnée d'une production d'images sans précédent : depuis la Grande Guerre, nul événement n'a eu lieu sans laisser derrière lui une multitude de photographies et de prises de vue animées. Ce livre propose une réflexion sur le rôle de l'image dans la médiatisation de l'histoire contemporaine à partir de l'oeuvre de Chris Marker. Révolution de 1917, seconde guerre mondiale, guerre du Vietnam, luttes de décolonisation, Mai 1968, effondrement de l'URSS et des régimes communistes du bloc de l'Est, 11 septembre 2001, etc. Tout au long de sa vie, Chris Marker n'a cessé de réfléchir sur les soubresauts de l'histoire contemporaine : il a traité de tous ces événements, et bien d'autres, dans une oeuvre foisonnante et polymorphe. Notons qu'à date, le rapport de Chris Marker à l'histoire n'a jamais fait l'objet d'un livre, en France comme à l'étranger.
Quel est l'intérêt du cinéma de Marker aujourd'hui ? Marker est un penseur autant qu'un cinéaste. Parmi les grands cinéastes, il est celui qui a le plus profondément et systématiquement réfléchi à la mise en scène cinématographique de l'histoire et à la façon dont celle-ci et la médiatisation ont affecté l'histoire réelle en montrant son envers et ses revers. À l'aide d'un penseur critique et engagé, témoin et acteur du siècle, il s'agit de proposer une lecture du XXe siècle tel qu'il s'est représenté. Il est également possible de tirer un enseignement philosophique de cette oeuvre très actuelle : le livre développe ainsi une réflexion originale sur le temps et la mémoire et analyse sous plusieurs aspects les rapports complexes entre image et réalité (la question de la technique, si chère à Marker, est également abordée).
Chez ce cinéaste-photographe-voyageur-écrivain, le rapport à l'histoire concerne aussi bien la question de l'écriture de l'histoire au cinéma que l'analyse des formes de la médiatisation de l'histoire (cinéma, télévision, Internet). Cette interrogation, puisqu'elle est présentée en images, s'accompagne d'une visée réflexive. Écrire l'histoire au cinéma, c'est alors questionner les sources (archives) ainsi que la forme du discours offert par le médium (montage). Finalement, pour Marker, écrire l'histoire au cinéma, ce sera aussi écrire une histoire du cinéma (et des médias). Pour le dire autrement, penser l'histoire c'est penser le cinéma tout en méditant sur l'époque et sur les moyens que celle-ci mobilise pour se saisir dans le temps. C'est aussi rendre sensible et visible des moments de l'histoire contemporaine (ce que tait l'histoire officielle ou ce qui n'intéresse pas les médias).
Dans cette perspective réflexive sur le médium, le livre est divisé en neuf chapitres traitant chacun d'une question de cinéma (Caméra, Faire image, Mise en scène, Spectateur, Corps, Regard, Auteur, Ville, Archives). Un tel angle d'attaque permet de développer une approche d'ordre théorique et esthétique en abordant divers moments de l'histoire contemporaine. Le livre se fonde sur des analyses de films, vidéos et textes de Chris Marker mises en regard avec des textes de philosophie, de théorie de l'image et du cinéma (Roland Barthes, Raymond Bellour, Walter Benjamin, Serge Daney, Gilles Deleuze, Jacques Rancière, Susan Sontag...) ainsi que d'histoire et de sciences sociales (Antoine de Beacque, Marc Ferro, François Hartog, Siegfried Kracauer, Sylvie Linderperg...).
Cet ouvrage collectif aborde l'oeuvre de Chris Marker par un angle original : la photographie.
Cet ouvrage collectif aborde l'oeuvre de Chris Marker par un angle original : la photographie. Cela n'exclut bien entendu par le cinéma mais le livre aborde la spécificité de la relation que Marker entretient avec le medium photo. Soulignons que ce travail n'a jamais vraiment été entrepris : les études sur Marker sont quasi exclusivement consacrés à ses films tandis que les histoires de la photographie contemporaine font l'impasse sur cette part de l'oeuvre (en France comme à l'étranger).
Intention générale Il s'agit d'une réflexion plurielle. Difficile de le définir celui qui ne s'est jamais laissé enfermé dans aucune définition. Homme-monde selon Raymond Bellour, Chris Marker (1921-2012) a traversé le court xxe siècle des historiens et l'avènement du xxie siècle. Il n'a cessé de s'intéresser à l'histoire de son siècle. Touche-à-tout de génie, ses écrits, films, vidéos, installations et créations multimédias sont traversés par la photographie, comme par un fil d'Ariane. Ces images ont accompagné le rapport du cinéaste à son temps et aux multiples espaces parcourus aux quatre coins du monde. Il a pu ainsi, dans une attitude de partage constant et selon une posture politique et artistique qui lui étaient propres, en saisir les mutations, les révolutions et les interrogations.
Il peut sembler paradoxal de proposer un ouvrage sur la photographie chez Chris Marker alors que son oeuvre est réputée être un tout, une sorte d'édifice dont on ne peut détacher aucun des éléments au risque de tout faire tomber... Mais précisément en prenant une partie de ce tout - sans rien ignorer de sa place dans l'ensemble - les auteurs de cet ouvrage cherchent à établir la spécificité et la relative autonomie de la photographie telle qu'un artiste visuel comme Marker - qui est également écrivain, cinéaste, musicien, graphiste, éditeur - la pratique et la manipule.
L'intérêt d'une réflexion plurielle, avec des spécialistes et des non spécialistes, des praticiens et des philosophes, des historiens et des artistes est de focaliser le regard sur ces aspects précis et originaux de l'oeuvre. L'ouvrage est illustré par des images photographiques (une trentaine) de nature différentes puisées dans l'ensemble de l'oeuvre de Marker.
Explication sur le titre Chris Marker avait l'habitude de signer ses films en mettant un point entre Chris et Marker. Sans doute en raison de l'abréviation de son prénom Christian, diminué en Chris, mais aussi comme un envoi, une sorte de télégramme. D'autre part la photographie est absolument collée à l'oeuvre de Marker : elle en fait partie mais on peut aussi la démarquer et l'analyser comme oeuvre autonome. Enfin, le même mot photographie désigne ici l'objet et la pratique, c'est à la fois un nom commun et un verbe conjugué au présent.